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Le Retour vers la Mer
21 novembre 2009

Le Bélem : la découverte

Nous sommes le 26 Août . Seulement cinq jours se sont écoulés depuis mon retour de Koz Kaztell . C'est à nouveau l'heure de lever l'ancre et d'appareiller pour la grande aventure : celle du Bélem .

Mon sac de marin pèse une tonne, au moins ! Tout y est : vêtements et sous-vêtements chauds, chaussures de bateau , bottes ( ah ! celui qui inventera les bottes super-légères ! ) bonnet, gants de bateau, oreiller ( ne pas oublier son petit confort ) veste et pantalon de cirée ( achetés à la coopérative maritime du Croisic, comme il se doit ) . Shakleton partant à la conquête du pôle sud devait être moins habillé !!!

Cap sur Roscoff, Finistère Nord . Depuis le Croisic, ça doit nous faire une route au 330 , à peu près. Mais aujourd'hui, il n'est pas question de compas de relèvement, d'amers ou de déclinaison, puisque c'est la SNCF qui me transporte. Même si avec elle tout est possible, je suppose que le conducteur n'utilise pas un sextant ! Je précise toutefois que traverser la Bretagne en train, c'est déjà une aventure : pas moins de quatre changements pour parcourir moins de 300 kms et le dernier trajet en autocar.

Il est 9 H 30 quand j'embarque dans le premier TGV qui va me conduire jusqu'à Nantes et l'arrivée à Roscoff est prévue pour 17 H 00 .

Pourquoi suis-je là aujourd'hui ?

Embarquer sur un trois mâts barque, c'est un vieux rêve . Je ne saurais dire à quand il remonte. J'ai l'impression que ce désir a toujours été là , c'est tout.

Et pourquoi le Bélem ? Peut-être parce qu'ici, ce nom est un mythe. Tout le monde connait ce bâtiment, qui est un peu " l'enfant du pays " . Le Bélem a en effet été construit à Nantes ( ma ville natale ) , par les chantiers Dubigeon. Le chantier naval dans lequel a travaillé mon grand'père maternel, Alexandre Chailleux , de 1932 à 1961. Evidemment bien des années après le lancement du Bélem qui eut lieu en 1896. Mais déjà pour moi, cela représente un lien particulier avec ce bateau.

Alors quand j'ai parlé de mon embarquement à mes amis du Croisic, immédiatement les yeux se sont mis à pétiller. Et toutes sortes de questions à fuser . " Comment t'es venue l'idée ? Comment as-tu fais ? Où aller vous ? Vous êtes combien à bord ? Il fait quelle longueur exactement ? C'est combien son tirant d'eau ?". J'ai aussi noté leurs remarques pertinentes, car ils le connaissent tous ce grand bâtiment : " c'est une coque acier ; il a fait le commerce vers les Amériques ; les Anglais l'avaient récupéré ..." . Même le pharmacien du port chez qui je suis allée acheter des médicaments contre le mal de mer ( je n'y suis pas sujette, mais on ne sait jamais ) et qui voulait savoir si j'allais faire une sortie en mer : " on peut embarquer sur le Bélem !!! Mais comment ? " . Puis avec de la nostalgie dans la voix : " j'aurai jamais le temps pour faire ça " . Et en guise d'au-revoir : " il y a bien des marins qui peuvent vous envier " ... Oui, je sais que je fais bien des envieux .

Et puis, il a fallu ce grand chagrin et l'obligation pour moi d'occuper mon esprit durant mes congés par quelque chose qui sorte de l'ordinaire. Et ce vieux rêve est remonté à la surface...

Les heures passent . Nantes, Rennes . Jusque là , le temps est splendide , ensoleillé et chaud . Mais passé la capitale de la Bretagne, la météo se dégrade. Et c'est sous le crachin que nous débarquons à Morlaix . A la gare routière, j'attends l'autocar pour Roscoff . Deux autres personnes , un homme et une femme, également . Nous portons le même accoutrement et chacun est chargé d'un gros sac. L'homme m'interpelle : " nous allons peut-être au même endroit ? ". " J'embarque sur le Bélem. " . " Moi aussi " . Echange de sourires . Ca y est, j'ai fait connaissance avec mes premiers co-équipiers.

Dans l'autocar, j'ai les yeux rivés sur mes chaussures , refusant obstinément de regarder le paysage. Morlaix, Saint Pol de Léon, Roscoff. Je suis venue ici en d'autres circonstances et ça ferait trop mal de reconnaître un lieu. Je redoutais ce moment. J'avais raison.

Par bonheur, Jocelyne et Alain , dont je viens de faire connaissance, me proposent de passer ensemble la soirée , jusqu'à l'heure de l'embarquement. Riche idée qui m'évitera des heures de solitude à Roscoff. Et nous faisons connaissance dans un bistrot du port, autour d'un thé bien chaud . Alain vient de Paris et Jocelyne de Rennes. A tour de rôle , nous allons faire une petite promenade solitaire dans la ville. Mes pas me conduisent en direction de la jetée , face à l'Ile Batz. Que c'est beau ici. Comme j'aurais voulu y venir plus souvent ...

C'est l'heure du dîner. Agréable moment passé à déguster des moules frites dans un petit restaurant. Nous échangeons nos impressions, nos interrogations, nos craintes . Serons nous à la hauteur ?  D'autres convives arborent des vêtements estampillés " Bélem " . Nous ne serons pas seuls.

Le Bélem est amarré au port des ferries et il faut effectuer un bon kilomètre de marche en guise de promenade digestive.

Et là, c'est la rencontre.

Attente_d_embarquement___Roscoff La_m_ture_illumin_e

Il est 22 H . A l'échelle de coupée , un matelot nous donne l'autorisation de monter à bord : " messieurs dames, le bateau est ouvert ".

J'avance timidement . C'est encore plus grand et plus beau que dans mon imagination. Et ce nombre incalculable de cordages et de poulies ! A quoi correspondent-ils et comment s'y retrouver dans tout cela ?

L'un après l'autre, nous sommes accueillis dans le grand roof, par un des lieutenants. Après vérification de notre identité, il nous remet notre " mug " ( tasse ) sur lequel est peint un numéro. J'ai le 47. A retenir, car ce numéro correspond aussi à celui de ma banette , et me permettra de savoir à quel tiers j'appartiens .

Je rejoins donc le faux pont, aussi appelé batterie, où se situe le logement des stagiaires. Le bâtiment peut accueillir jusqu'à 48 stagiaires . Nous sommes " seulement " 33 pour cette traversée entre Roscoff et Portsmouth. Les cabines se répartissent de part et d'autre d'une très longue table où sont pris les repas. Dans chaque cabine, 4 banettes et casiers. Je prend donc possession de mon petit espace personnel : me voici chez moi .

Les_cabines_des_dames

Mon_p_tit_chez_moi

 

La_batterie

Je pars ensuite à la recherche du tableau où est mentionnée l'affectation aux tiers et aux rôles. Les Tiers, c'est ce qui réglemente la vie de l'équipage à bord y compris les stagiaires et permet d'assurer la continuité du service à la mer. L'équipage est donc divisé en 3 tiers , qui successivement prennent le quart, se reposent , déjeunent.

Pour l'instant, pas simple de s'orienter et j'ai quelque mal à découvrir ce fameux tableau qui se cache en bas de la descente bâbord !

Ca y est, nous y sommes ! Je fais partie du tiers blanc. Demain 27 Août. Je serai deux fois de quart dans la journée , de 12 H à 15 H et de 20 H à 24 H . En revanche , pas de service pour moi lors de cette première journée . Les heures des repas sont également précisées . Il y a deux services pour le déjeuner et pour le dîner . Ca sera donc 11 H ( avant le quart ) et 19 H .

C'est le moment pour chacun de rejoindre ses quartiers . Mais c'est bien difficile ce soir de s'endormir. Le voyage, le retour à Roscoff, la découverte de ce qui va constituer mon univers durant une semaine, tout cela tourne dans ma tête. Et il est plus d'une heure du matin quand je m'abandonne au sommeil. 

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  • Les vicissitudes de la vie me conduisent à tourner la page que je pensais si solide et à retourner vers celle qui fut si longtemps ma complice : la Mer. Toutes voiles dehors ! Je vous invite tout simplement à découvrir et à partager ma route.
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