Ma soeur la noyée
Je suis née sur une plage aux grains bleutés d’ardoise
Qu’une croix de granit protège des tempêtes,
J’ai quitté l’Océan à l’écume turquoise,
Je suis venue au jour dans cette mer d’iroise.
Un matin d’émeraude sous le vent du grand nord,
Dont se joue en riant la querelleuse mouette,
Deux vagues d’or lascives en atteignant le bord,
M’ont couchée sur le sable et transformé mon corps.
En cette vie antérieure, au royaume des ondes,
Je sais un chant de larmes qui monte de l’Armor :
C’est ma sœur , la noyée, à la chevelure blonde,
Qui pleure la terre des humains et le cruel monde.
Un jour viendra où il faudra appareiller,
Quitter la calme échancrure de la côte sauvage,
Et renaître à la mer. Lors, ma sœur, la noyée,
Nous nagerons sans fin, loin des rives oubliées.